(I) Eleanor, la gamine qui s'invite à l'improviste. Grossesse adolescente imprévue et un peu trop soudaine. Bébé pas vraiment désiré, elle a su faire chavirer le coeur de ses parents par son seul sourire. Charme inné dont elle profite souvent pour n'en faire qu'à sa tête, rendant ses parents complètement chèvres. (II) Adolescente populaire malgré elle grâce à ses prouesses en gymnastique. Cheerleader talentueuse, on l'envie comme on la jalouse, et nombreuses sont celles à vouloir la destituer de son trône. Eleanor n'a que faire de cette réputation, de cette hiérarchie élitiste qui semble régir Hawkins High. À vrai dire, Eleanor ne se soucie pas de grand-chose, à cet âge-là. Mais elle a conscience de ce qu'on dit dans son dos. Qu'elle est trop grande, qu'elle manque d'agilité. Mais surtout, on la critique sur sa couleur de peau. Beaucoup n'accepte pas qu'une noire, qu'une métisse comme elle ose se hisser au sommet de la sorte. Mais Eleanor refuse de se laisser faire et de tendre la joue, lançant des piques à quiconque voudrait la déstabiliser. Son point fort toutefois ? Ses poings. Quand les mots ne suffisent plus, elle n'hésite pas à frapper. Peu importe l'âge, peu importe le sexe. (III) Gamine qui change de passion tous les trois jours, elle se prend d'intérêt pour la peinture avant de changer pour le piano. Un mois plus tard, c'est le football, puis la gymnatisque. Véritable touche à tout qui ne semble jamais vraiment trouver sa véritable vocation. On lui pardonne de par son jeune âge. Mais les années passent, et c'est la même rengaine. Hyperactivité non déclarée, Eleanor ne tient pas en place, et son cerveau non plus. Tout l'intrigue. Elle entame bien des choses, sans jamais vraiment les terminer. Avant de passer à autre chose. Ce n'est qu'à quinze ans qu'elle semble avoir trouvé sa voie : le bricolage. Après des années à voir son père réparer tel ou tel objet, ou à prêter mains fortes à ses voisins lorsque leur voiture les lâche. C'est sans doute la seule chose qui semble la calmer et l'apaiser. (IV) Elle a quatorze ans lorsqu'on lui propose sa première bière. Elle en a quinze lorsqu'elle prend de la weed pour la première fois, et seize ans lorsqu'on lui présente d'autres stupéfiants en tout genre. Elle fume sans même se soucier un seul instant de ce que cela cause sur sa santé physique et mentale. Elle boit à chaque fête. Comportement auto-destructeur destiné à la faire sortir de l'atmosphère toxique qui règne à Hawkins. Eleanor veut oublier le temps de quelques minutes, heures. Elle veut planer, se réfugier dans ces psychotropes qui la détendent, lui offrent une alternative bien plus apaisante et utopique que ce que la réalité a à offrir. Elle a vingt ans lorsqu'elle manque de mourir dans un accident de voiture. Conduite sous stupéfiant. Eleanor voit sa vie défiler devant elle. Gifle en plein visage, elle arrête ses conneries, jette toutes ses doses et coupe les ponts avec son dealer. Les débuts sont difficiles, mais elle parvient à passer ce mauvais cap. Désormais elle s'en tiendra à la nicotine. Et aux chewings-gums. (V) Adolescente qui refuse les clichés, elle s'assume telle qu'elle est : ambivalente à souhait. Véritable garçon manqué qui n'a pas peur de se salir les mains ou de se casser un ongle, Eleanor sait également être des plus féminines. Revêtir talons hauts, robes et maquillage, avant de tout troquer pour un jean troué, de vieilles baskets et une casquette pour camoufler ses cheveux pas du tout coiffés ? Cela ne lui fait aucunement peur. À vrai dire, elle jongle entre les deux genres très régulièrement, présentant une façade de femme fatale un jour, puis celle du véritable garçon manqué le lendemain. Elle s'en amuse, et en abuse.(VI) Membre de la chorale qui se démarque par une voix particulière, elle aurait tout à fait pu rejoindre Broadway. Et avec ses notes plus qu'exemplaires, ce n'est pas les universités qui manquent. On s'attend sans doute à ce qu'elle suive le même shéma que celui de ses parents avant elle, et celui de tant d'autres encore. Faire des études, épouser un mec avec une bonne situation, avoir trois enfants, et s'en occuper pour les trentes prochaines années à venir. Mais Eleanor n'a jamais nourri les mêmes rêves de gloire ou de normalité que beaucoup de ses camarades. Elle, elle rêve d'aventures. Et entre pourfendre un dragon et se lamenter des heures durant que son prince vienne la délivrer ? Elle prend le dragon, sans hésiter. (VII) Eleanor a dix-neuf ans et se présente au garage, demandant à y avoir un poste. Une demoiselle aux traits délicats qui fait toujours propre sur elle ? Forcément, on lui a ri au nez. On lui dit de retourner dans les jupons de sa mère, et de faire ce qu'elle fait de mieux : préparer des sandwichs. Loin de se démonter, elle se contente de hausser un sourcil. Pointe du doigt la voiture dans le fond, celle que tout le monde semble avoir oublié. On la dit sans espoir, bonne pour la casse. Eleanor leur lance un défi : si elle peut la réparer d'ici une semaine, elle récupère le job et la voiture. Faire d'une pierre deux coups. Et les mecs se foutent de nouveau de sa gueule, mais acceptent. Comme pour la placarder, en quelque sorte. Que croit réussir une femme que dix bons hommes n'ont pas pu faire ? Eleanor se pointe cinq jours plus tard avec une voiture flambant neuve et un eye-liner impeccable, sous le regard sidéré et dubitatif de tout un banc de blaireaux. Elle obtient le job. Et tous les meilleurs clients, évidemment. (VIII) Hawkins, ça lui sort des yeux. Une routine qui la tue à petit feu, alors qu'elle fait ces mêmes allers-retours entre le garage et chez sa mère. Rien de nouveau, rien d'excitant. Eleanor en a marre. Ça la gonfle de toujours voir les mêmes gens, et leurs têtes de con. Et si elle aime ses parents plus que tout au monde, eux aussi n'ont rien de bien intéressant à offrir. Une famille banale, une vie banale. Ça lui donne envie de se flinguer. Elle rêve d'ailleurs, de voir autre chose - de faire le tour du monde, et découvrir le plus de pays et de cultures possibles. Mais son compte en banque ne lui permet pas de quitter le pays. Qu'à cela ne tienne ! Eleanor ne se laisse pas démoraliser de la sorte. Une valise pleine à craquer, la moitié de ses économies, et la voilà partie tout droit vers le prochain état, sans même prévenir qui que ce soit. (IX) Road-trip improvisé, elle s'arrête dans un hôtel en plein Illinois. Elle y reste trois jours avant de continuer sa route, tout droit vers la Californie, en passant par l'Utah et le Nevada. Los Angeles et ses gratte-ciels à n'en plus finir. Le soleil chaud et la mer à perte de vue. Elle s'essaie au surf, mais se rend compte que ce n'est définitivement pas pour elle. Une semaine à siroter des cocktails au bord de la plage, et à dormir dans un hôtel miteux, quelque part sur Sunset Boulevard. Deux jours plus tard, elle est à Las Vegas. Elle risque la moitié de ses économies, mais gagne un certain pactole. Assez pour repartir, et descendre vers le Nouveau-Mexique. Roswell et ses soi-disant aliens. Eleanor n'y croit pas une seule seconde, mais elle apprécie l'ambiance décalée de la ville. C'est là qu'elle croise Cheryl, dont elle se moque ouvertement du prénom. Mais toutes deux nouent une amitié particulière, intime. Elles dorment à même le sol, à la pleine étoile. Puis Cheryl repart, sans même demander son reste. Et Eleanor fait de même. C'est à Lafayette qu'elle vole une voiture, une décapotable en plein sur un parking de Gap. Elle change la plaque d'immatriculation et la couleur, avant de monter vers New York. Parvient à se faire inviter à une session VIP d'une représentation sur Broadway - A Woman of Independent Means. Dernier petit tour par le Massachusetts (Salem et ses célèbres chasses aux sorcières), puis Eleanor finit par rentrer au bercail, émerveillée par tout ce qu'elle a pu voir. Pas une seule fois l'idée de prévenir ses parents ne lui passe par la tête. Et pourtant, elle en a acheté des cartes postales. Elles sont au fond de sa valise, pour faire joli. (X) Elle revient en ville, une cigarette aux coins des lèvres, l'air de rien. Il fait nuit noire, et il n'y a plus personne dans les rues, si ce n'est Mrs Howard. Mais elle est toujours là pour espionner celle-là. Rien n'a changé en trois semaines, apparemment. La décapotable garée à la va-vite devant l'entrée du Bradley's Big Guy, elle pénètre l'épicerie d'un air nonchalant. Trois barres de céréales, une boîte de chewing-gum, et une bouteille d'eau. Un véritable repas de champion. Passage en caisse, la meuf la dévisage étrangement. Eleanor le lui rend bien. C'est là qu'elle l'aperçoit. Cette affiche, avec sa tête en gros plan. MISSING. Affiche noyée parmi tout un tas d'autres, certaines remontant à plusieurs mois, et d'autres, bien plus récentes. Un exode rural massif ? Pas étonnant. Hawkins est un véritable trou à rats. Eleanor arrache l'affiche, la plie en quatre, et la met dans la poche arrière de son jean. Elle paye sans demander son reste, ne jetant même pas un regard en arrière, la caissière toujours bouche-bée.

(en vrac) Sa mère lui a appris le danois. Et c'est très utile quand elle veut insulter quelqu'un. Comme ses clients. Ou ses machistes de collègues. // Elle a horreur de l'union soviétique, un comble quand on connait les véritables origines de sa mère. Mais Eleanor ignore tout du passé maternel, et se permet donc de cracher sur tout ce qui ressemble de près ou de loin au communisme. // Ses goûts musicaux sont assez hétéroclites, passant du hard-rock au classique. // Elle collectionne les timbres et les cartes postales. // Elle est dyslexique. // Amoureuse des animaux, il n'était pas rare pour elle d'adopter tout un tas de bestioles étant plus jeune, que ce soit un chat ou une abeille en mauvais point. // Elle parvient à reproduire le moon-walk de Michael Jackson, et ça lui permet de frimer en soirées. // Allergique au lactose. // Sait tout ce qu'il y a à savoir sur l'invention du micro-ondes. Pourquoi ? Elle-même n'en sait rien. Mais vous pouvez lui poser la question.