Aucune idée de comment il s'est retrouvé là, en compagnie du fils du maire, Ethan, le gamin bizarre qui a un peu toujours évoluer dans son cercle sans qu'il puisse y faire grand chose, que son père forçait un peu trop à se lier d'amitié avec lui. Ce n'est pas le premier qui essaye, ni le dernier, mais, avec Ethan, ils gravitent toujours l'un autour de l'autre, sans réellement expliquer pourquoi. Et cette nuit, c'est un moment de ce genre, alors que Storm allume son joint, le dos posé contre l'une des pierres tombales du cimetière de Hawkins, assit dans l'herbe, et qu'il sent les picotements dans sa nuque, désagréables. Il ne sait jamais. Est-ce que c'est le manque, est-ce que c'est les hallucinations qui arrivent, est-ce que c'est ça. Dans tous les cas, ses doigts s'activent sur le briquet qu'il laisse retomber ensuite à côté de sa chaussure vernie, son autre main s'affairant à déboutonner un peu sa chemise après avoir desserré le noeud de sa cravate. "C'est quoi le genre de truc débile qui traîne dans les cimetières auquel tu crois ?" Storm demande finalement en posant sa tête contre la pierre tombale pour pouvoir couler un regard au blond à ses côtés, tellement prêts, que le King se dit que s'ils avaient été six pieds sous terre, ils partageraient le même cercueil. Il lui passe le joint, après une dernière latte, le regard tellement vitreux, qui souligne que c'est sans doute déjà le joint de trop qu'ils se partagent ce soir. "Les fantômes ça ne compte pas." Il souffle finalement, le regard toujours fixé sur Ethan. Non, les fantômes il a l'impression de pouvoir les sentir lui aussi, qui éveillent les frissons sur sa peau, qui se moquent dans l'ombre. Il pourrait presque les entendre rire. C'est Hollis, en plus cruel.
Ses doigts jouent nerveusement sur l'air, il ne sait pas si les joints vont aider à mettre son cerveau en pause, ou au contraire si ça va embraser plus la parano qui s'installe dans le derrière de son crâne, qui se fiche dans les ténèbres en attendant de pouvoir éclater d'un coup. Lever de rideau. "Non, je parle de tes copains, tu sais. Nessie et compagnie." Il a déjà entendu tellement de conneries sortir de la bouche d'Ethan que ça l'a tellement démangé entre le frapper et l'envoyer bouler, sans se retrouver à faire ni l'un ni l'autre, juste à le regarder de travers en essayant de savoir d'où il sort ce gamin dérangé. Et pourtant, c'est avec le dit gamin dérangé qu'il est en train de partager ce moment, ses joints, son ressenti de l'étrange, même sa putain de pierre tombale. Rien que la vision lui permettrait un bannissement instantané de la famille King. C'est un secret, et quelque part il sait Ethan presque aussi fucked up que lui, assez pour lui faire confiance après des années de relation toxique, qui n'a clairement fait aucun bien au fils du maire, ou encore à lui-même.
"J'ai écouté ton émission aujourd'hui, au bureau." Il revoit clairement, la radio allumée, sa tasse de café, sa troisième cigarette de la matinée et le visage décomposé des conneries que pouvait raconter Ethan. Pourtant c'est toujours le même show qui tourne quand il arrive, complètement défoncé, et qu'il écoute avec la porte verrouillée pour pas qu'on l'emmerde pendant qu'il se lance dans sa journée. "C'était vraiment naze." Comme tous les matins, sans doute, pourtant c'est toujours lui dans le fond de son planage total, peut-être qu'il a la voix pour. "Depuis quand t'es végétarien ?" C'était l'information qu'il avait retenu dans tout le bordel d'émission de la matinée. "C'est même plus fun de te voler ton déjeuner maintenant, Wayne, c'était le seul truc pour lequel t'étais utile." Il étire du bout de ses lèvres, visiblement fumer lui fait raconter tout et n'importe quoi, c'est charmant quelque part, dans le timbre de sa voix un peu trop rauque qu'il élève pas plus qu'un murmure, pas besoin de crier pour se faire entendre, les voisins sont assez calmes ici, faudrait pas les déranger. Sa main se tend ensuite tâte le bras d'Ethan, l'esprit dans le léger coton que lui crée l'herbe, remonte jusqu'à sa main, localise le joint entre ses doigts.

Ethan est à moitié convaincu d'être toujours endormi. C'est ça ou le joint de la veille a des effets bien plus longs qu'il ne le pensait. Sans doute un savant mélange des deux qui lui a violemment grillé les neurones. C'est loin d'être la première fois, et loin d'être la dernière. A moitié affalé contre une pierre tombale, les cheveux en bataille et des cernes de trois jours sous les yeux, il a tout l'air de faire parti des lieux. Un esprit venant rôder une fois la nuit venue, hantant probablement le lieux de sa sépulture. Il n'en est rien. Malgré ses airs de cadavre défraîchi, Ethan est bel et bien vivant. La tombe sur laquelle il est avachi appartient à une certaine Joanna Wheeler, décédée en 192x. La date est à moitié effacée, tout comme la pierre en elle-même tombe en morceaux. Qui qu'elle eût été, il est évident que plus personne ne vient lui rendre visite depuis longtemps. Avant que Ethan ne vienne la déranger dans son sommeil éternel, évidemment. Désolé Joanna, fais comme si j'étais pas là. En face de lui - Storm King, tout autant out of it que lui, et qui s'allume un joint comme si c'était la chose la plus normale qui soit en plein milieu de la nuit, dans un cimetière. Comment ils en sont arrivés là, Ethan est bien incapable de le dire. Âmes somnambules qui vagabondent parmi les cénotaphes, animées par une sensation aussi étrange que désagréable. J'en sais rien ? Des goules ? Il a lu un truc à ce propos un jour, dans un livre. Il est bien incapable de se rappeler du titre, mais c'était de l'horreur un peu décalé. Le genre de truc assez bien pour faire durer le suspens, mais dont le plot twist fait perdre tout crédibilité au contexte. Mais ça l'étonnerait même pas, au final, que des saloperies pareilles rôdent dans le coin. Je pense pas que les fantômes trainent dans les parages. Si j'étais un esprit, je foutrais le camp d'ici. C'est pas les fantômes qui viennent hanter les gens, c'est leur souvenir. Non, par ici, il n'y a que des démons. Des êtres venus tout droit des Enfers pour les attirer droit dans leur antre. Et il peut les sentir, tout proche - trop proche.

Au fond, il sait bien que Storm se fout de sa gueule. Personne ne le prend jamais vraiment au sérieux, c'est un fait. Ethan, il s'en moque bien, au final, de ce qu'on peut penser de lui. Surtout avec un joint coincé entre les lèvres - la fumette vient lui cramer ses derniers neurones de rationalité et de logique. Tu t'es trompé de continent. Et de bestiole. Mais t'as au moins retenu le nom, faut pas trop t'en demander je suppose. C'est leur mode de communication : s'envoyer des crasses en pleine gueule, comme pour se prouver qu'ils sont plus intelligent que l'autre. Ethan avait tendance à s'écraser, avant. Plus maintenant ; il gueule, il renchérit. Y'a rien de très sain là-dedans - y'a qu'à voir leur passe-temps. Comme maintenant, en l'occurrence. C'est une bonne situation, vous pensez, de se passer un joint à l'ombre d'une pierre tombale ? Tous les psychiatres du monde ne suffiraient pas à décortiquer tout ça. Pourquoi tu t'acharnes à écouter si c'est naze ? Pour passer le temps. Ou pour combler le silence. Ethan est loin d'espérer un semblant d'affection de la part du King - ce serait trop leur demander, à ces snobs - mais il ne peut empêcher un rictus de prendre place sur ses lippes.  Ma voix te manque tant que ça ? qu'il rétorque, prenant une nouvelle bouffée, avant d'expirer la fumée en plein au visage de Storm. Depuis trois ans. Mais c'est bien, je constate que ton cerveau rame toujours autant. Ils en ont fait des diners depuis le temps. Ou plutôt, ils ont du les subir, responsabilité familiale oblige. Son père le traîne absolument partout, et c'est toujours chez les King que ça se termine. Ca rend bien pour sa prochaine campagne électorale, vous comprenez. Ethan aimerait bien pouvoir hurler et faire la gueule, comme un adolescent. Protester que c'est idiot et qu'il a mieux à faire. Et il a bien mieux à faire que de se coltiner des soirées entières à devoir observer tout le gratin de Hawkins, avec leur sourire glauque et leur balais dans le derrière. En trois ans de repas foireux, Storm a bien dû réaliser le contenu de l'assiette de Ethan. Il faut croire que non. Quoi, tu comptes encore sur les autres pour te faire à bouffer ? C'est ta tante qui fait ton linge aussi ? Ca l'étonnerait même pas, en fait. Et à trente piges, ça fait pitié.

Ethan pourrait se casser. Il est à deux doigts de lever les yeux au ciel, mais il a la flemme de bouger. Les pierres tombales n'ont rien de très confortable, mais avec un joint dans le sang, il a la tête dans le coaltar. Il sait aussi que s'il se lève, les picotements à l'arrière de sa nuque vont tripler d'intensité, et il n'a vraiment pas la motivation de se prendre la tête avec ça. Non, la weed aide grandement. Il oublie. Il pense à autre chose. Quitte à devoir supporter la présence de l'autre débile. Débile qui lui vole son joint, d'ailleurs. Ou est-ce celui de Storm de base ? Il ne sait pas ; il ne sait plus. Ethan sait juste qu'ils sont bientôt à court d'herbe, et que ça va pas aider leur cas. Je suis certain que t'en as d'autres dans ta voiture, dans la boîte à gant. Je suppose que t'es pas motivé pour aller les chercher ? A ce stade, ils sont à peine en état de ramper.

La fumée s'élève entre leurs visages, aussi blafards l'un que l'autre, en accord harmonieuse avec le paysage, âmes égarées parmi les fantômes déjà présents, si quelqu'un avait l'idée de passer par-là il se dirait très certainement que le cimetière est hanté. Peut-être un peu, qui sait. Et il doit bien avoir des théories sur ça aussi, Ethan, qui n'en loupe jamais une, c'est toujours incroyablement sympathique de l'écouter déblatérer des heures sur le sujet, avec l'esprit complètement défoncé, comme dans l'instant présent. Des goules ? Le King hausse des épaules, roule des yeux et sa gorge laisse échapper un grognement rauque. "Et c'est censé être quoi exactement, ça ?" Parce qu'il n'a pas la même connaissance de l'étrange que le fils du maire, lui il se coltine juste les démons qui traînent dans le coin, c'est déjà suffisant à son humble avis. Il entend ensuite l'avis sur le fait que les fantômes ne doivent certainement pas traîner dans le coin et Storm sent un sourire paresseux étirer ses lèvres, le sourire du mec totalement défoncé qui voit la pierre tombale en double déjà. "Y a Joanna qui veut te dire deux mots." Il siffle en amorçant un mouvement du menton pour signaler la présence de l'esprit derrière Ethan. Peut-être qu'il dit ça pour l'emmerder, peut-être qu'il a encore une de ses hallucinations et que la jeune femme aux longs cheveux blonds était bien en train de se tenir ici. C'est juste dommage qu'elle avait l'air prête à les étriper. En même temps il la comprend un peu, Storm, ça l'emmerderait aussi qu'on vienne squatter sa tombe comme ça, encore plus si c'était Ethan, parce que c'est la priorité de faire en sorte que le gamin du maire ne se sente pas à sa place nul part. Après ce n'est pas comme si Storm respectait quoi que ce soit non plus, encore moins la tombe contre laquelle ils se sont installés.
Dans le manque total de respect, donc, le King vient poser sa tête contre le marbre, le regard posé sur les bouts de ciel déchirés qu'offrent les arbres, il contemple les étoiles en prêtant une attention trop importante à Ethan et ses histoires. Peut-être que c'est aussi le joint qui commence à définitivement trop lui taper sur le système aussi, vaut mieux que ça soit ça qu'un quelconque intérêt pour le blond. "Tu ne m'en voudras pas de ne pas me perdre dans les fables de gamins." Storm répond en se frottant l'oeil droit du dos de la main, comme pour bien lui montrer que ça l'emmerde plus qu'autre chose ces histoires, et il n'avouera jamais être légèrement piqué au vif quand Ethan le pense pas capable de retenir une information. Et il l'a, il le sait, il la sent sur le bout de sa langue, il a juste cette putain de drogue qui est en train de l'envoyer planer a des années lumières. Et Ethan pose la question qu'il se pose tous les matins, pourquoi s'acharner à écouter ça ? Ce tissu de conneries qui le fait grogner aussi tôt dès le matin, perdu dans son café et sous l'effet encore de la meth qu'il vient de se fumer. "Ca me met d'une humeur de chien dès que j'arrive et me pousse à être encore plus exécrable avec tout le monde, je fais ça pour le bien de la boîte." Storm se retrouve à répondre pourtant, de la voix traînante et rauque, comme s'il ne se demandait pas il y a quelques secondes pourquoi est-ce qu'il faisait ça, comme si la répartie avait toujours été là, au final. Sa voix qui lui manque, ça c'est assez pour lui arracher un reniflement moqueur, avant de se sentir perdre pied un peu sur la fumée qui glisse sur son visage, et clairement ça fait trop longtemps qu'il n'a pas eu le joint. "Je ne vais certainement pas venir te flatter en répondant à cette question, sois un minimum cohérent." Il demande alors qu'il a l'impression de s'enfoncer dans plus de coton encore et que l'obsession pour reprendre le joint abandonné semble grandir en lui, mais au moins il n'a pas encore la pulsion animale de venir le récupérer.
Visiblement ça fait trois ans maintenant qu'Ethan est végétarien, et le blond souligne son cerveau qui rame un peu, il faut dire qu'il n'a pas tord, le seul problème c'est que lorsqu'il se retrouve forcé à côtoyer autant de King et que ça tombe pile quand tout le gratin de Hawkins est invité, Storm n'a plus rien de lucide une fois sur place. Visiblement la cocaïne et le vin rouge font une bonne paire dans ces moments là et c'est à peine s'il peut se souvenir du contenu de sa propre assiette, clairement Ethan voit juste mais en même temps, il frôle l'abus total. "C'est te flatter de croire que je porte un intérêt à ce que tu fais à ces soirées." Storm reprend du bout des lèvres, retenant un soupir, toujours dans l'ombre de sa tante lorsqu'elle est là, ou alors flanqué avec la solitude, toujours cet air sur le visage qui ne donne pas forcément envie de s'approcher. Storm a l'habitude, la solitude fait partie de sa vie depuis longtemps, les dernières années ont encore été plus difficiles sur ce point de vue, mais même parmi les King il ne se complaît pas aux bavardages idiots. Dans le fond, ils sont pareils, Ethan et lui, et pourtant aucun des deux ne veut ouvrir les yeux sur ce sujet. Il sent bien la pique qui suit dans les paroles du blond ensuite, le problème c'est qu'il se rappelle à peine de quand il doit se faire à manger, et ne sait même plus ce qu'il est advenu de sa dernière lessive. La pique atterrit là où elle doit, au final, et ça fait un mal de chien, parce qu'il se croit drôle à mentionner sa tante comme ça, seule personne pour laquelle Storm a du respect et pour qui il ferait n'importe quoi. "Elle a une famille dont elle s'occupe déjà," il note en sentant l'amertume fleurir en lui, il n'est pas sa priorité malgré toute l'affection qu'elle a pour lui, et ne s'imposerait jamais comme tel. "T'es vraiment un branleur." Il rajoute en secouant un peu sa tête.
Le joint ne vient pas alors Storm étire sa main pour aller le chercher de lui-même, il sent les démangeaisons dans le creux de sa nuque qui s'insinuent doucement le long de sa colonne, il sent le manque qui le nargue. Il sait. L'herbe ne fera plus rien au bout d'un moment, il va juste avoir besoin de plus, quelque chose capable d'anesthésier complètement ce qu'il pense, et s'il a encore la force pour lancer des réparties à Ethan et se laisser avoir par la tristesse, c'est que clairement il faut faire quelque chose. "... non." Il répond simplement à la proposition d'aller jusqu'à la voiture, il a peur de se relever et de juste sentir le sol l'accueillir à nouveau à bras ouverts, la gueule fracassée contre l'une des pierres tombales du coin. Joanna ça la ferait marrer ça. "J'ai plus." Il souligne quand même, Storm, alors qu'il tire de la poche intérieure de son costume une petite poche soigneusement scellée avec trois cachetons dedans. "Mais t'es tellement relou, je vois pas pourquoi je devrais partager mon ecsta' avec toi." Quelle hâte de se retrouver en rehab à nouveau, l'acclamation du prince qui retourne à la déchéance pure et dure pendant que son paternel essaye de sauver les apparences. Faudrait pas qu'il reste enfermé, il doit se faire voir à la menuiserie, mais faudrait pas non plus qu'il continue à se défoncer comme ça. "Tu seras peut-être plus agréable avec ça dans la tronche." Il glisse finalement, mais en bon camé, il lui donne rien, c'est lui qui gère, à ouvrir la poche après avoir tiré sur le joint, il n'y a plus de tremblements dans ses doigts quand il ouvre avec minutie et en tire un des trois cachetons. Toute la délicatesse du monde, faudrait pas le faire tomber. "Alors ?" C'est tout ce qu'il propose, en attendant qu'Ethan se décide à ouvrir la bouche pour venir y déposer, ou non, le petit cacheton. Et cette fois c'est lui qui souffle la fumée sur le visage du blond.

La fumée lui crame les neurones tout comme elle lui délie la langue, et Ethan se sent planer loin de tout ce bordel, loin du cimetière et d'Hawkins, alors même qu'il se sent profondément ancré sur place, le cul fermement enraciné au sol. Une ambivalence qui semble le poursuivre depuis des années maintenant, et qu'il entretient sans même le vouloir. L'âme piégée entre deux mondes bien distincts, dont l'un semble vouloir le tourmenter de plus en plus nuit après nuit. Ca l'étonnerait pas, d'ailleurs, qu'il y en ait des fantômes et des goules, qui rôdent dans cet univers qui hantent ses cauchemars. Des bestioles avares de cervelles et de chair humaine. Ses connaissances sur le sujet font écarquiller des yeux bien des gens, et nombreux sont ceux à le juger pour ses passions plus qu'hétéroclites et loin d'être moralement acceptables. Il peut encore très bien entendre les sermons du prêtre à ce sujet, et le traiter d'enfant du pêché. Well. Ethan se contente généralement de lui fumer en pleine tête pour simple réponse. T'as rien à craindre à ce niveau-là, c'est pas comme si t'avais quelque chose là-dedans, qu'il explique en pointant sa tempe. Ils en sont au même niveau, en réalité. Il n'y a plus rien que la fumée et la weed, autant dans le sang que dans le cerveau. Joanna pourrait vraiment se trouver là derrière lui, prête à lui rompre le cou, que Ethan ne s'en étonnerait aucunement. Et un instant, rien qu'un, le cimetière revêt cette atmosphère si particulière. Un orage gronde au loin, le ciel perdant de sa tranquillité pour laisser place à des . Et les grognements si distincts, si particuliers, lui semblent bien trop proches, comme si ces mêmes entités qui hantent ses nuits se trouvaient là, juste à côté de lui. Il cligne des yeux. Puis, plus rien. Les alentours demeurent plongés dans la pénombre et le silence, mais le ciel ne gronde pas. Et le sol ne se dérobe en rien sous leurs pieds. Alors, non, Joanna ne l'inquiète en rien. Elle a peut-être envie qu'on lui prête un joint, la demoiselle. Il la comprend. La mort ça doit pas être une partie de plaisir tous les jours. Déjà que la vie ne l'est en rien, ça doit empirer après. Alors Ethan fait en sorte de fumer le plus en direction de la dite Joanna, crachant la moitié de ses poumons sur Storm par la même occasion.

Tu préfères te perdre dans la dépression et la décrépitude ? Y'a qu'à voir le regard complètement vide du King pour comprendre que y'a pas que la weed qui anime ses soirées - et ses journées. De nous deux, c'est toi qui fais le plus peur. A vrai dire, je crois que les résidents du cimetière jalousent quelque peu ton teint blafard et tes cernes de trois semaines. Et oui, certes, Ethan en a aussi, des cernes. Elles lui creusent le teint et marquent ses traits pourtant juvéniles. C'est Kane qui s'en plaint sans arrêt, prétextant qu'il a tout d'un coussin confortable pourtant. Et Ethan aime le réconforter dans cette idée-là. Mais ses insomnies viennent lui foutre des baffes chaque nuit, sans interruption. Il semble évident, pourtant, que Storm se noie sous le poids de ses démons, sans jamais parvenir à regagner la surface. Il suffoque. Et Ethan n'a aucune main à lui offrir pour l'en extirper, pas dans son état actuel. Son état constant, à vrai dire. Il n'y a pas à dire, ils font la paire. Oh, toutes mes excuses. Je peux parler de la pluie et du beau temps la prochaine fois, de manière à te mettre les nerfs encore plus à vif. Tes employés me remercieront pour ton état déplorable. Vine se plaint certainement des sautes d'humeur insupportables de son très cher cousin. Si les théories farfelues de Ethan peuvent aider à péricliter la chose, qu'il en soit ainsi. Il s'en sent d'autant plus flatté. J'entends pourtant les louanges sous ta voix d'outre tombe. qu'il rétorque, en venant foutre ses jambes pile sur celle de Storm, pas le moins dérangé du monde. Il s'étale encore plus, de tout son long, comme pour mieux venir empiéter sur le territoire du King. Et il adore ça, le titiller.

Faut dire, tu passes la moitié des soirées à baver dans ton assiette et à fixer le mur comme si tu voulais l'épouser. Ethan ne passe pas non plus tout son temps à observer Storm. A vrai dire, il évite le regard de tout le monde quand il s'agit de réunir tout le gratin de Hawkins. Le glamour des King dans toute sa splendeur. Son ton dégouline de sarcasme et d'exaspération, quelque peu résigné aussi. Il déteste les King et leur manie de toujours prendre tout le monde de haut. C'est ce que son père aurait probablement aimé que Ethan devienne : un abruti égocentrique et imbu de lui-même. Jokes on him. Ethan est un abruti stone et complètement à côté de ses pompes à la place. Tu n'es donc pas capable de faire une lessive seul, merci pour cette confirmation. Il voit bien que Storm souhaite changer de sujet, et que cette pique atterrit là où ça fait mal. Mais Ethan n'a pas la conscience d'esprit d'arrêter quand il le devrait. Serait-ce une pointe d'amertume dans tes paroles Storm ? Ethan est bien trop au fait de la relation conflictuelle de Storm avec son père. Le blond ne peut que compatir, celle avec son propre père étant loin d'être au beau fixe. Et tout le monde sait que Rose Lindvall l'a pratiquement élevé. Je te retourne le compliment. Après tout, ils sont tous les deux complètement défoncés en plein milieu d'un cimetière. Il n'y a pas de meilleure définition qui les définit actuellement.

Ils sont tous les deux nazes, c'est son constat, bien que Ethan ne l'avouera jamais, préférant reporter toute la faute sur Storm. Comme toujours. Trop défoncés pour se relever, condamnés à se regarder dans le blanc des yeux, la tête dans le coaltar le plus complet. Trop de weed dans le sang pour même aller chercher cette même substance si précieuse. Ils ont touché le fond. Ethan renifle bruyamment, comme pour profiter des derniers brins de fumette qui règnent dans l'air. Ils sont dépendants de cette saloperie ; Ethan étant bien incapables de fonctionner convenablement sans trois sachets dans le nez. Il ignore même ce que c'est que d'être sobre. L'ignore depuis trop longtemps maintenant. Mais cet autre monde l'effraie. Alors c'est la weed obligé. Les yeux qui s'écarquillent à la vue des cachetons, et une main qui s'aventure déjà dans leur direction. Les drogues dures, c'est pas son truc, d'ordinaire. Mais au point où ils en sont, ça peut pas les achever plus qu'ils ne sont déjà. Au moins, ici, personne ne les jugera. Pas même Joanna, qui semble apprécier l'atmosphère encens full on weed. Good for her. Tu me dois déjà trois joints. Tu te souviens, la soirée chez les Hathaway, y'a deux semaines ? Non pas qu'Ethan regarde les scores. Mais c'est exactement ce qu'il fait. Et lorsque Storm s'exécute, ouvrant le sachet avec un professionnalisme certain - tirant un haussement de sourcils impressionnés du blond - c'est Ethan qui sent ses membres tout entier vibrer d'excitation. Ouais, ça non plus c'est pas bon signe. Il met un moment à comprendre le sous-entendu du King, avant de finalement ouvrir la bouche en grand, tel un enfant euphorique à l'idée de recevoir un bonbon. Sauf que c'est pas un excès de sucrerie qui le guette. Le souffle du King est bien trop proche, Ethan peut sentir son haleine empestant l'herbe, alors qu'il se penche pour lui offrir la dragée tant désirée. Et Ethan le fixe droit dans les yeux pendant tout ce temps, sans même cligner des yeux. C'en est presque indécent. Aussitôt le cacheton sous la langue que Ethan voit l'univers tout entier se dessiner sous ses pieds. C'est l'euphorie toute entière qui le gagne, alors qu'il rigole comme un idiot. Wow. C'est moi ou Joanna a une jumelle ? Qu'est-ce qu'il est con. Il continue de rire, alors que sa vision empire, et que les hallucinations s'invitent de plus belle. Joanna avec un double au sourire tout aussi démoniaque. Sauf que sa doublure a des dents beaucoup trop pointues. Et qu'elle grogne. Well excusez-moi young lady. Où sont donc passées les bonnes manières ? Elle me juge je crois. Ou alors c'est toi. Je crois qu'elle veut te bouffer mec. Sous l'effet de la drogue, sa connexion avec cet autre monde s'intensifie un peu trop, et tout vient se mélanger, se bousculer dans un pêle-mêle confus. Mais même complètement défoncé, son regard ne dévie jamais vraiment du visage de Storm, qu'il observe intensément. T'es trop sérieux. Cesse donc de froncer des sourcils comme ça, ou tu vas avoir des rides bien trop tôt. Tu me diras, j'en vois déjà. Le mode sarcastique ne s'éteint donc jamais vraiment à priori. Bon à savoir. Et alors qu'il sermonne Storm, il lui balance des fleurs - desséchées pour la plupart - en pleine tête. Si tu continues tu vas finir par faner et flétrir comme ça.