Depuis quelques temps, les jours se suivent et se ressemblent. Tu aimerais dire que les choses vont de mieux en mieux en ville mais la réalité, c’est que tu as l’impression que chaque jour plonge votre ville dans un peu plus de noirceur. Les affiches des disparitions se multiplient sur les portes du diner, si bien que le propriétaire du Benny’s a dû les mettre ailleurs pour ne pas déprimer les clients dès leur arrivés. Mais ce n’est pas suffisant, tu entends les conversations, elles tournent toutes autour du même sujet, un sujet qui les hante. Pour une fois, tout le monde dans la ville semble parler de la même chose. Naturellement, tu penses à Mick et tu te dis qu’il s’est barré au bon moment. Tu te dis que tu devrais partir aussi, rien ne te retient vraiment. Enfin si, eux, les serpents. Lui, le prince. Merde, tu restes. Les heures défilent avant que tu ne quittes ton tablier de serveuse pour reprendre ta véritable peau de serpent. Ce cuir noir qui te définit. Puis tu files en passant par la cuisine pour prendre deux menus et marcher jusqu’au Jefferson’s Garage où tu sais qu’il doit encore être. « Rassures-moi, il te paye les heures supp ? » En vrai, tu t’en fiches, ce n’est pas ton problème. Toi ce que tu veux, c’est aller manger un bout, discuter avec lui.

Depuis le départ de Mick, ta vie était un peu bouleversée. On ne peut pas dire que ce départ précipité te surprennent vraiment, il parlait souvent de l’armée comme d’un moyen de fuir son héritage de Serpent. Alors son silence, sa fuite, ça avait du sens bien. Les serpents sont loyaux, son père ne l’aurait pas laissé partir, Nate et toi, vous le saviez et même si aucun de vous ne l’aurait trahi, le doute persiste entre la loyauté envers Mick et celle envers les serpents mais maintenant. Qu’est-ce qui l’empêchait de vous écrire maintenant ? Plus personne n’avait la moindre pouvoir sur lui. Ton cœur est brisé par ce départ, même si tu t’y attendais, même si il a déjà joué avec ton cœur beaucoup trop de fois. Mais depuis son départ, c’est surtout à Nate que tu penses. Et cela vous a beaucoup rapprochés sans que tu n’en prennes totalement conscience.

Et tu supposes que comme toujours, il n’a pas pensé à son repas ou alors, il s’est préparer un sandwich improvisé dans un frigo presque vide, bref, pas de quoi se donner faim. Alors comme souvent, tu avais attrapé deux menus à la fin de ton service et tu avais fait les quelques mètres qui vous séparent. Tu entres ensuite dans le garage, essuyant les regards de ses collègues qui manquent cruellement de finesse, tête droite, buste fière, tu t’en fiches pas mal de ses vieux. Tu es juste dégouté face à la plupart qui doivent avoir l’âge de ton père. Puis un sourire apparait sur ton visage quand tu arrives à son niveau. « Je pourrais. » Tu lui souriais, utilisant ton charme et cet air arrogant qui te qualifie plus que tu le voudrais. « Si j’avais su, j’aurais pris un dessert ! » Tu riais légèrement avant te laisser entrainer vers l’extérieur en le suivant. Vos pieds semblent savoir parfaitement où ils doivent aller et vous rejoignez la table à quelques mètres de la porte du garage. « Ouais. Je crois » Non, mais est-ce que ça intéresse vraiment quelqu’un ? On sait tous que c’est une question de politesse. Et toi, tu sais bien que personne ne s’intéresse jamais vraiment à toi. « Et toi ? » Parce que tu te plains d’avoir laissé ton cœur se faire briser en l’ayant vu venir mais lui. Lui, il ne semble pas l’avoir vu venir.

A chaque voir que tu vois Nate, ton cœur se pince. Bien que tu es toujours traité les jumeaux comme deux personnes différentes, personne ne peut nier les traits de visages pourtant si semblable. Alors forcément quand tu vois Nate, une partie de toi voit le visage Mick, souvent seulement pour quelques secondes car tu dois bien avouer que le moins farouche des serpents reste beaucoup plus gentil avec toi que son frère. Tu ne saurais dire comment mais tu te sens bien plus à toi-même quand tu es avec Nate que ce que tu pouvais être avec Mick, comme si dans tes moments avec Mick, il y avait toujours un moment de reproche face à ton blouson noir. Blouson qui ne peut pas déranger Nate puisqu’il est la tête couronné de votre gang.

Pour une fois, tu arrives au bon moment et l’extraire du garage n’est pas compliqué. Il te suffit d’un sourire et de l’odeur de la friture pour qu’il t’entraine vers une table à l’extérieur. Elle ne paye pas de mine, elle est vieille et surtout, elle a subit les marqueurs de la jeunesse. On peut tout lire sur ce genre de table, ça te fait sourire. Quand tu étais au lycée, tu ne comptes plus les nombres d’heures que tu as eu parce que tu gravais sur ce même genre de bois. C’est d’ailleurs, durant ses fameuses heures que tu as vraiment appris à connaitre Nate. « Tu me connais si mal ? » Comment si tu allais sauter le dessert. Tant pis pour la taille parfaite de mannequin, tu n’as jamais été le genre de femme à vouloir être parfaite pour un homme –enfin à l’assumer ouvertement-. « Nate, c’est ton frère. » Sans t’en rendre compte, tu poses ta main sur son genou avant de la retirer presque aussi vite.  « Je veux dire que c’est normal que tu en parles et je t’avoue que moi aussi j’aimerais savoir si il va bien mais c’est Mick. » Laissant ton regard partir vers l’horizon par peur de croiser le sien, par peur de ne pas pouvoir finir ta phrase. Une phrase que tu n’as jamais osé dire à voix haute, bien que cet aveu n’aura rien d’une surprise pour Nate. « J’ai bien plus de souffrance que de bonheur avec lui donc je sais qu’il ne m’écrira pas. Je sais qu’il est déjà dans les bras d’une autre de toute manière. » Tu te fais une raison, Joleen. Mick il a toujours su le pouvoir qu’il avait sur ton cœur et ça t’a toujours tué de ne pas arriver à t’en échapper mais c’est ainsi. Il te fait souffrir et toi, tu subis. « Toi, tu es son frère, il reviendra vers toi, j’en suis convaincu. » Le silence qui s’installe sur ce genre de conversation, c’est tout ce que tu crains et ses mots, son changement de sujet te confirme son accord. « Cola, frites et .. ce burger rien que pour toi. » Son préféré, enfin de ce que tu avais pu voir, tu as toujours été très observatrice et tu as pu remarquer sa peine l’autre jour quand le diner était en rupture.